Minimiser le stress des fêtes

30 novembre 2022

Minimiser le stress des fêtes

Le temps des fêtes est souvent un beau moment de retrouvailles, mais il peut faire monter notre stress. Catherine Raymond, chercheuse postdoctorale au Département de psychologie de l’UQAM vous donne des stratégies concrètes pour minimiser le stress des fêtes.

Fêtes de noel

Vous êtes spécialiste du stress. Si je vous dis « personne proche aidante », à quoi pensez-vous?

À un individu dans toute sa subjectivité et son unicité, avec des émotions et un rythme de vie qui lui est propre, et qui fait le don de soi pour aider un proche. Plusieurs proches aidants voient leurs vies chamboulées, se sentent dépassés par les événements, avec la sensation de ne pas en faire assez, de ne pas être à la hauteur...

Les personnes proches aidantes cumulent le stress de la personne aidée en plus du leur. Il a été démontré que, dans la dyade aidant-aidé, lorsqu’on aide l’une des deux personnes à diminuer son stress, celui de l’autre diminue aussi. Gardez en tête l’image du masque à oxygène dans l’avion : il faut d’abord mettre le sien avant d’aider les autres. On doit agir de la même façon en situation de stress : il faut d’abord gérer son propre stress avant celui de l’autre. D’où l’importance de prendre du temps pour soi et d’appliquer des stratégies pour réguler le stress.

À l’approche des fêtes, comment peut-on reconnaître le stress et ses manifestations?

Un bon truc est d’écouter notre corps. Les hormones de stress circulent dans le sang et atteignent plusieurs régions de notre corps. En situation de stress, on présentera plusieurs symptômes physiologiques : cœur qui bat la chamade, respiration accélérée, transpiration, agitation ou maux de ventre (diarrhée, constipation, envie urgente d’uriner, brûlures d’estomac). Les symptômes gastro-intestinaux sont fréquents et souvent causés par le stress.

Les hormones de stress atteignent aussi notre cerveau, qui régule nos émotions et nous aide à nous concentrer. En situation de stress, le cerveau peut nous envoyer plusieurs signaux : insomnie, problèmes de concentration, colère spontanée, impatience, irritabilité, tristesse envahissante ou difficulté à contenir une émotion désagréable.

Lorsque l’un ou l’autre de ces symptômes se manifeste, il convient de se demander : « Y a-t-il quelque chose de différent en ce moment dans mon quotidien? » Les fêtes, par exemple! Ou encore : « Y a-t-il eu des changements dans la situation de mon proche ou dans ma propre vie? »

En fait, ce qui déclenche le stress (sauf dans le cas d’agents stressants majeurs comme un tremblement de terre) sont des situations face auxquelles nous avons peu de contrôle, qui sont imprévisibles, nouvelles ou qui menacent notre égo. Ces ingrédients du stress peuvent être classés sous l'acronyme C.I.N.É.

stress

Pouvez-vous nous en dire davantage sur les déclencheurs de stress « C.I.N.É. »

Il existe deux types de stress. Le premier est le stress absolu, c’est-à-dire découlant d’une situation qui menace notre survie. Par exemple, le fait de souffrir d’une maladie pouvant entraîner la mort est une forme de stress absolu. Le deuxième type, le stress relatif, se voit beaucoup plus souvent au quotidien. Il est relatif à la personne, dépend de sa subjectivité et de son expérience. Ici, tout réside dans la façon d’interpréter une situation qui, bien qu’elle ne menace pas notre propre survie, active notre système biologique de stress.

Les recherches montrent que, peu importe le type de stress subi, la réponse est toujours « comme si » il y avait une menace à notre survie. Par exemple, on est au parc avec notre enfant autiste et on sent les regards se tourner vers nous quand il se désorganise. Cette situation produit une réponse de stress « comme si » elle représente une menace à notre survie, même si ces regards ne constituent pas une réelle menace à notre existence.

Le stress relatif survient lorsqu’on fait face à une situation qui comporte l’une ou plusieurs des quatre composantes suivantes du C.I.N.É :

  • Contrôle faible : Vous avez l’impression de ne pas avoir de contrôle sur la situation. Pour reprendre l’exemple de l’enfant au parc, vous sentez que vous n’avez aucune emprise sur le regard et le jugement des autres.
  • Imprévisibilité : Un événement imprévisible survient dans votre quotidien. Par exemple, le médecin appelle pour donner rendez-vous à votre conjoint cet après-midi. Or vous avez une grosse journée de travail en vue et n’êtes pas en mesure d’intégrer ce rendez-vous dans votre horaire! Autre situation d’imprévisibilité : la difficulté à prévoir l’issue d’une situation. Par exemple, vous accompagnez un parent à la clinique pour des tests médicaux et attendez les résultats…
  • Nouveauté : Votre parent malade s’installe chez vous. Il faut vous habituer à cette nouvelle réalité et réorganiser votre vie de famille.
  • Égo menacé : Dans l’exemple de l’enfant au parc, les regards se posent sur vous…

Une seule composante est suffisante pour activer le système de stress. Plus il y a de composantes dans une même situation, plus le stress augmente.

Avez-vous des pistes concrètes pour minimiser le stress des fêtes?

Il faut apprendre à reconnaitre les signes du stress (cœur qui bat la chamade, maux de ventre, insomnie…) et à comprendre ce qui les déclenche.

Par exemple, cette année, vous avez un budget limité pour les cadeaux des fêtes. Vous appréhendez de ne pas pouvoir en acheter autant que vous le voudriez. Vous identifiez le caractère imprévisible de la situation : vous ne savez pas si vous arriverez à acheter tous ces cadeaux.

Autre exemple : tous les ans, vous recevez votre famille dans le temps des fêtes et tout doit être absolument parfait. Or, cette année, du fait de votre rôle de proche aidant, il est impossible que tout soit parfait. Votre égo est menacé.

Déterminer les caractéristiques de la situation qui nous stresse (C.I.N.É.) nous permet de mieux agir sur celle-ci.

Ainsi, dans l’exemple précédent, pour éliminer l’imprévisibilité, vous décidez de ne pas acheter de cadeaux, et de plutôt offrir à vos proches et amis des biscuits faits maison. Et pour le souper des fêtes, vous n’avez tout simplement pas le temps de préparer un repas parfait. Plan A : vous décidez de ne pas recevoir cette année. Plan B : vous recevez, mais chacun apporte un plat.

Cette démarche permet de découvrir à quelle composante du C.I.N.É. vous êtes le plus sensible. Ainsi vous pourrez organiser vos journées de façon à éviter le plus possible cette composante particulière!

Que faire lorsqu’il est impossible de trouver des stratégies pour éliminer l’une des composantes du stress?

On peut élaborer des stratégies alternatives. Par exemple :

  • Prendre du temps pour soi. Pour certaines personnes, il n’est pas possible de s’accorder beaucoup de temps. Dans ce cas, une solution simple serait de tout de même prendre quelques instants pour pratiquer une activité qui nous plaît. Par exemple, prendre dix minutes pour faire une promenade, compléter une grille de mots-croisés, appeler une ou un ami, se mettre quelques minutes plus tôt au lit et profiter d’un moment de lecture...
  • Bouger, faire du sport. Il est important de dépenser de l’énergie, parce qu’une situation de stress en mobilise beaucoup. Le système de stress est évolutif; il est là pour nous permettre de combattre ou de fuir le mammouth. Pour reprendre l’exemple du parc, vous n’allez pas vous battre contre les gens ou vous enfuir à toutes jambes. Mais votre corps vous y prépare. Prenez quelques instants pour utiliser cette énergie. Marcher, par exemple, aide à dépenser cette énergie accumulée.
  • Le soutien social est la clé! Créez des liens avec les gens. Rapprochez-vous de personnes de confiance, capables de bienveillance ou joignez-vous à un groupe de soutien pour échanger et vous libérer de ce qui vous pèse.
Loisirs

C’est bientôt Noël… Qu’est-ce qui vous stresse le plus pendant les fêtes et comment y faites-vous face?

Mon plus grand stress, c’est de voir tout le monde, d’être là pour les gens que j’aime! Je suis en situation de proche aidance; ma mère a un cancer généralisé. Gérer tout ça pendant le temps des fêtes, ce n’est pas évident… Je veux avant tout être à la hauteur de ce que je souhaite offrir à mon entourage.

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Après un baccalauréat en psychologie à l’Université de Montréal, puis une maîtrise et un doctorat en neurosciences sur les effets de l’adversité durant l’enfance sur le stress chez l’adulte, Catherine Raymond travaille maintenant à mieux comprendre le stress chez l’enfant et ses répercussions, telles que l’anxiété et les symptômes dépressifs. Elle prépare aussi un deuxième doctorat en psychologie pour devenir clinicienne auprès des jeunes.

Propos recueillis par Karine Cloutier, chargée de projets aux communications à l’Appui pour les proches aidants. Merci à Catherine Raymond pour ce dialogue sans stress aucun!

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